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2 février 2010 2 02 /02 /février /2010 18:28

lapin.jpg

Lapin sorti de ce chapeau



On connaissait le coup du lapin. Voici le test du lapin.
En effet, n’est-ce pas une ingénieuse façon d'éprouver la placidité et le caractère conciliant d’un(e) éventuel(le) petit(e) ami(e) que de lui poser un lapin ?
Si il (ou elle) se montre irascible au-delà du raisonnable et éclate d’une colère à la limite de l’hystérie au premier rendez-vous raté, l’affaire est entendue : la love-affair n’aura pas lieu. Courage, fuyons !
Si il (ou elle) se montre compréhensif(-ve), on peut affiner le profil du sujet en élaborant une échelle comparable à celle de Richter, mais pour les séismes du cœur ; le nombre de lapins atteint étant celui auquel le cobaye résiste sans se mettre à tout renverser sur son passage par ses tremblements de rage. Un peu comme les étoiles pour les skieurs. Sauf que là, on remplace le « sk » de « skieur » par « ch ».

Un lapin : terrain glissant, sujet aux avalanches. A éviter.
Deux lapins : surface bosselée, moyennement stable. A aborder avec circonspection.
Trois lapins : piste de luxe, moelleuse sous le pied.

Au-delà, on atteint le grade honorifique du bouquetin, bête à cornes de haute montagne, qui conserve sa noblesse en toutes circonstances, gardant le pied sûr même au milieu des éboulis les plus escarpés.
Il y a aussi des variantes : par exemple, un rendez-vous annulé quelques heures seulement auparavant s’appelle un lapereau. Un lapereau équivaut à un demi-lapin.
Notez que si le lapereau épargne au délaissé le pénible temps de l’attente angoissée proprement dite, il lui inflige tout de même le châtiment de la préparation pour rien, ce qui, s’il s’agit d’une dame, peut valoir son pesant d’efforts : ravalement de façade, passage au papier de verre, polissages en tous genres, lessive et repassage express de la petite robe qu’on veut absolument porter, sans compter le bain annuel si c’est une cousine d’Abraracourcix…
A vot’bon cœur, m’sieur’dame. : ))

NB : Entrent aussi dans la catégorie « lapin » les messages sans réponses et autres tristes silences. En ce cas, on parle de lièvres. Un lièvre peut parfois donner la fièvre. C’est la fièvre caf’rdeuse.
Ex : « La petite a encore de la fièvre. Elle a encaissé un lièvre. » (Oublié de Bas’l’Sac, Splendeurs et Misères des Courtisanes. A moins que ce ne soit Illusions perdues.)
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2 janvier 2010 6 02 /01 /janvier /2010 01:25



Il y a quelque part, entre cordes vocales et fibres du myocarde, sinuant du gosier au poitrail, quelque amas filandreux qui s’emballe et s’emmêle, chante clair, vibre vif. Mais parfois, le violon du gosier contracté, accordé à la danse, en violence, de la joie dilatée l’assourdit, é-muette, corde à nœuds, corde à « Meuh » qui s’émeut et se fige, comme au milieu d’un chant allègre, le son trop pur se heurte au mur d’une mort petite, subite et s’étouffe en silence, étranglé de trembler de frissons si aigus.
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14 décembre 2009 1 14 /12 /décembre /2009 00:10

Il l’avait si souvent laissé choir, le flacon fissuré aux ivresses estropiées,
et s’étonnait de ne plus sentir sous ses doigts que les éclats coupants du verre mal recollé.

C’est ainsi : l’œil doit suivre la main.
Ce n’est que pour l’inerte qu’habitude vaut regard.
Et encore, l’inerte qui ne craint pas le choc.
A la rigueur, une casserole, on peut l’attraper au fond du tiroir sans trop y voir.
Mais une tasse en porcelaine, c’est déjà plus délicat.
La main aveugle mésuse du vivant, saisit sans voir, passe à côté du mouvant perpétuel, heurte et se blesse.
Cécité d’un geste sourd aux fêlures.

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26 novembre 2009 4 26 /11 /novembre /2009 18:07

 

Voici livré en intermède le petit exercice de style laborieux qui me fut commandé pour le journal du lycée. Indulgence requise pour les pesanteurs capillotractées. Je vous prierai néanmoins de remarquer que supporter des lourdeurs à la seule force de ses cheveux mérite considération.


NB : Les ajouts et corrections apportés suite aux suggestions de nos aimables lecteurs figurent en bleu.
Merci à vous.



Sur le piano aux huit octaves de flammes bleues, le chef d’orchestre toqué de blanc joue de sa batterie : au fond des cuivres, les fricassées fredonnent leurs accords grésillants.
Tandis que le batteur, électrique, fait monter la sauce, le chevreuil danse une gigue dans la grosse caisse de la marmite.
De son archet d’acier, le maître queux découpe quelques tranches parfumées sur son violon de jambon*, dont les notes aromatiques font vibrer ses narines chatouillées. 
Au bout du rouleau à pâtisserie, le petit mitron somnole, et le chef excédé chante (comme une casserole) une messe basse furibarde au marmiton :
« Mets un bémol à tes épices ! Ce tournedos Rossini est massacré ! Bien trop de notes poivrées. Et révise tes gammes de saveurs.  »
Le pauvre gâte-sauce répond de son filet (d’agneau) de voix cristalline et flûtée, aérienne comme des bulles de champagne :
 « Excusez-moi, Chef, j’éviterai dorénavant de commettre brioches** et canards** dans mon chaudron***. »
Surplombant sa bedaine rebondie, le chef reprend :
« Et cesse de jouer du mirliton, petit mitron.
Fais plutôt rissoler les chanterelles et les trompettes de la mort. »
Sur le lutrin, il continue de déchiffrer la partition de sa recette.
Et soudain facétieux, du bout d’une baguette fine comme un gressin qui croustille sous la dent et l’oreille, le chef montre à son apprenti l’accord majeur sucré-salé qui résonnera de mille nuances sous la voûte grenat du palais garni de chairs cuites et fondantes. Du fond de la cave, l’échanson se charge d’en décupler l’écho, en ajoutant le contrepoint dionysiaque qui ruissellera dans les gorges enivrées.
Enfin, pendant que le café murmure sa petite cantate, la ronde empesée des desserts entourés de crêpes gavottes en dentelles s’accélère peu à peu en un cake-walk endiablé avant de se clore
sur l’opéra : la douce Melba au teint de pêche se charge du final, mais la Belle Hélène l’interrompt par un crescendo de coulis chocolaté en pleine poire.
   

* Jambon = violon en argot musical.
** Fausse note, en argot musical.
*** Mauvais piano

 

 

 

 

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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 22:32

 

Ou ce que peuvent donner les cogitations approximatives d’une lycéenne littéraire égarée en terminale scientifique, pendant les neuf heures de maths et les cinq de physique (si ma mémoire est bonne) imposées à sa folle semaine.

J’ai toujours aimé les maths. Cette façon de percer le secret du réel en formules acérées se jouant du bon sens, à tout prendre, est-elle si différente du travail du poète ?
Certes, c’est à la mode. Deux numéros déjà que Télérama consacre en quelques mois à la beauté des maths, réaffirmant leur appartenance au vaste monde fort accueillant de la culture. Sans oublier la nécessaire rubrique de Madame de K,
chantre officielle inspirée d’icelles.
Mais oui, c’est beau, les maths, qui en doutait ? Ce monde idéal où les objets n’existent que par leur définition, où formules et figures coïncident dans une parfaite harmonie, où les théorèmes se vérifient toujours.
Mais s’il me divertissait grandement de transposer un problème en équations, de figurer une force par un vecteur, de traduire sans fin une expression en une autre équivalente jusqu’à l’avoir réduite à sa plus simple expression, j’avoue avoir dédaigné avec morgue les fastidieuses formules chimiques et autres mystères électriques auxquels je demeurais aussi hermétique que le tribunal de l’Inquisition devant les démonstrations de Galilée.
Car la différence essentielle entre maths et physique est là : en maths, on maîtrise le système, de a à z. C’est un petit monde clos, qui fonctionne uniquement par autoréférences : énoncé, définitions, théorèmes. Tout y est, et rien d’autre. Si on a pigé le truc, on peut le retrouver tout seul, même si la mémoire fait défaut. D’ailleurs, les matheux sont souvent connus pour leur mémoire de poisson rouge. Quel besoin de s’encombrer d’une formule qu’on peut redémontrer sans trop de peine ?
Alors qu’en physique, et bien sûr je ne parle pas là de la science elle-même mais des programmes du secondaire, n’ayant pas poussé le vice à aller voir plus loin, on vous assène des formules que vous n’avez pas les moyens théoriques de comprendre, qu’on vous demande de bien vouloir apprendre par cœur et d’appliquer alors même que vous y allez à l’aveuglette, comme si l’on voulait que vous fassiez joujou avec un hochet en plein milieu d’une obscure forêt, juste parce que les concepteurs des programmes ont pensé que ça vous esbaudirait les esprits animaux de voir la diode s’allumer et le petit machin faire « tut » quand vous fermez le circuit. Ouais ! Ca marche ! Vous avez suivi le mode d’emploi, étape par étape, et ça marche ! Vous n’avez pas compris pourquoi, vous ne le pouvez pas parce que le processus mis en œuvre excède grandement ce qu’on vous a expliqué, mais vous êtes prié de vous émerveiller.
Ben ça m’énerve. Sans compter que les électrons vont dans un sens et l’électricité dans l’autre, parce qu’on n’a pas corrigé l’erreur du premier savant qui a choisi au courant un sens conventionnel et qui ignorait à l’époque que les électrons avaient une charge négative.
Résultat : après un bac C, je suis toujours infichue de brancher correctement un interrupteur.
Passons.

Alors je m’amusais, durant ces longues heures qu’il fallait bien subir, à philosopher sur la physique, à injecter un peu de psy dans ce phy dont trop d’éléments m’ennuyaient ; à faire de ces formules des sciences des symboles des hommes.
Et je m’étais ainsi avisée un jour que l’on pourrait représenter, fort grossièrement je vous l’accorde, pas la peine de hurler, l’humaine psyché sous forme d’ectoplasmes patatoïdes, à inscrire dans un de ces repères orthonormés et tridimensionnels qui servent à figurer ces adorables fonctions à trois variables. Vous vous souvenez ?
Soit x l’axe des abscisses, y celui des ordonnées et z celui de la troisième dimension.
Et bien donc, dans mon petit monde déconnecté d’ado binoclarde et proprement effrayée par tout ce qui n’était pas pur esprit et ressemblait de près ou de loin à de la chair humaine, on pouvait représenter chaque type de caractère par un solide gélatineux, façon Barbapapa
dont chaque dimension correspondrait à une variable fondamentale de son moi profond.

En x, on figure les largesses du cœur : l’altruisme, la générosité, les capacités d’amour qui vous portent vers l’autre. Version passive, la sensibilité, l’empathie ; version active, l’abnégation.
En y, on place la hauteur de vues : l’intellect, les facultés d’entendement, d’abstraction.
Et en z, ce qui permet de dire « il ira loin » : la volonté, la force de caractère, la persévérance.
Où l’on s’aperçoit que les tournures de la langue n’ont  pas attendu ce genre de schéma pour figurer le caractère en 3 D.
 En plus, on peut affiner l’outil : au-delà de ces trois types primaires, ça vous donne une palette de sept combinaisons (Ah, les délices des combinatoires !
C indice n puissance p = 2 puissance n ; ici 2 puissance 3 = 8, moins un
car nul n’est néant et l’on ne tient pas compte de l’élément o,o,o.
Ce qui nous donne 8-1 = 7. CQFD.) …
qu’on peut ensuite varier à l’infini selon les degrés de chaque dimension, les textures, les couleurs, les densités, les formes, …

Bien sûr, tout cela demeure fort réducteur, et si l’on s’avisait de vendre cette symbolique combinatoire à des profilers ou des chasseurs de tête pour compléter la batterie des tests de QI et autres mises en boîte de la matière humaine, oui, on pourrait rouspéter. Mais tout cela reste entre nous, et c’est la première fois que j’ose faire part de ce cafouilleux bidouillage qui dormait dans mes carnets depuis l’année lointaine de mes seize ans.
La faute à Ayron  
qui réveilla, avec sa citation biblique laissée en commentaire sur le billet (b moins 2) , ces antiques velléités modélisatrices. Je le cite :

« La Bible fait une analogie entre l'humanité et un bouquet de végétaux rituels dans lesquels le parfum représente l’esprit, ainsi que la connaissance; tandis que le fruit représente l’action :
- Le cédrat, fruit et parfum symbolise les personnes qui étudient et agissent.
- La branche de palmier représente ceux qui agissent sans se cultiver.
- La myrte symbolise ceux qui cultivent leur esprit et sont érudits.
- La branche de saule, représente ceux qui n’étudient pas et n'agissent pas. »

Voilà, nous commencerons par les trois types primaires :
(NB : Il est bien entendu que le zéro affecté à chaque coordonnée est tout relatif)

- Le premier, Barbagentil, « x,o,o » de son petit nom, (« on veut pas être méchant, mais effectivement, il est gentil ») s’étale grassement, tout dégoulinant de tendresse pour son prochain, mais n’a pas inventé l’eau tiède. Un peu collant.
Un taxi-guimbarde qui avance cahin-caha, n’hésitant pas à faire mille détours pour rechercher les déshérités au fin fond des routes les plus boueuses. Tout ça ne mène pas bien loin, ne va pas bien vite, mais en sauve plus d’un.
- Le second, Barbabrute  (« o,o,z » en langue de maths) avance, loin souvent, mais pas haut, écrasant tout sur son passage. Un rouleau compresseur.
- Le troisième, Barbintello (« o,y,o » pour symbole) possède une intelligence supérieure, mais est invivable, imbuvable, intraitable.
C’est une fusée. La Terre lui est trop basse et trop étroite. Il brûle de tout savoir, il brûle toutes les ressources disponibles, et ne s’accommode d’aucune finitude. C’est l’espèce d’homme qui s’approche le plus du diable ou du bon dieu. Tout dépend de ses autres variables.

Bienvenue donc au niveau 2, avec les trois types secondaires :

- Barbasensible, aussi noté « x,o,z », est doué d’un fort pouvoir d’empathie, qui le rend réactif à la moindre émotion, les siennes comme celles des autres, sensitif au plus infime frémissement de ce qui l’entoure. Cette hyperesthésie lui est moteur quand les vents sont propices, mais l’étendue de sa voilure le rend vulnérable aux souffles contraires ou au calme plat. A la merci de toute houle un peu forte, il tangue et peut sombrer. « Fluctuat nec mergitur » espère-t-il pour devise, craignant parfois que le « nec » se transforme en « et ». On l’aura compris, c’est un voilier. Hisse et haut, glisse et bas, car n’ayant pas plus d’autonomie énergétique que de volonté interne, il dépend de ce qu’il peut absorber de la force du monde. Ainsi sont bien souvent les poètes et artistes.
 
- Barbapuissant, ou encore « o,y,z », allie à une volonté de fer une intelligence qui lui donne les moyens de ses fins. Il fonce vers l’horizon à ras de terre. Il va vite, il va loin, mais tout cela ne vole pas toujours bien haut non plus.
C’est un TGV, bien sûr de lui sur ses rails dont jamais il ne sort, ignorant beaucoup des espaces qu’il traverse et transperce sans les voir. Ainsi sont la plupart des puissants, en politique ou ailleurs.

- Barbabienfait, « x,y,o » associe à un altruisme impressionnant énergie et persévérance. C’est un tramway omnibus, qui s’épanouit en milieu associatif et humanitaire.

Enfin, Barbagénie, parfaite combinaison d’ « x,y,z », allie à une intelligence hors du commun une générosité sans faille et une ferme volonté. Une main de fer dans un gant de velours, pour la bonne cause et sans se gourer.  Et là, plus besoin de le figurer sous forme de moyen de transport : il a tout sur place. C’est une sphère parfaite, un monde entier à lui seul. 

Vous me direz : « Toute cette fumeuse usine à gaz pour ça ?! » Alors qu’elle ressemble autant à des maths que certaines « œuvres » à de l’art ; alors qu’elle ne suscite que haussements d’épaules consternés et soupirs exaspérés chez tout véritable esprit matheux qui se respecte ?

Euh, ben oui. Avec toutes mes confuses excuses pour le dérangement, fit-elle avec un sourire niais et un gloussement idoine. Ca fait deux fois de suite qu’elle vous fait des sandwiches ou vous ouvre des boîtes de conserve au lieu de cuisiner. Va falloir se reprendre ou bien fermer boutique.  :(
Et encore, on vous a épargné les schémas illustratifs…

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24 février 2009 2 24 /02 /février /2009 23:23

 

C’est une question de densité. Nous sommes des éponges.
Certains absorbent, d’autre dégorgent.
Certains ont ce besoin de toujours se trouver
de nouveaux flux où abreuver leur désert intérieur.
D’autres n’en peuvent plus, débordant d’un trop plein bouillonnant de courants et de vagues.

Certains s’agitent au beau milieu du tourbillon, là où se croisent les énergies,
en reçoivent et en donnent, traversés de mille forces,
déplaçant des montagnes, propulsant les remous.
D’autres s’échouent dans le bras mort. Hors d’haleine, hors d’élan, hors des lignes de force.
Nulle énergie ne leur parvient, nulle vigueur ne les anime.
Epuisés d’inertie, anémiés d’inaction ; abandons d'impuissance, ils attendent.

Un fragile équilibre pour chacun :
les premiers multiplient les échanges, renforcés de tout acte accompli.
Jusqu’au point de rupture, surmenés à pleurer,
éperdus dans leur for intérieur étourdi, assommés de ces bruits.
Et les autres parfois, d’un échec sur la grève, d’un regard vers le ciel,
échappant de si peu à leur funeste soif, retrouvent l’équilibre,
et, sans souffle de vent, se souviennent qu’ils ont pied à défaut d’avoir plume
acceptant de marcher quand flotter ne se peut.


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1 janvier 2009 4 01 /01 /janvier /2009 20:19

(Et elle récidive, en plus.)

 Définition n°2

L'amour, c'est un désir de possession en équilibre sur l'exigence de liberté.
Et c'est super casse-gueule.

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30 décembre 2008 2 30 /12 /décembre /2008 01:22

 

(Essai, échec, un perd et passe)

Les cloportes colportent un discours si visqueux.
(Petit regret sur le mépris induit par ces "cloportes" mais leur musique me trottait dans la tête
depuis si longtemps qu'il fallait bien les emmener prendre l'air sur la toile d'araignée.)
Il est si difficile de bien, vraiment bien parler d’amour.
Parler de l’amour, depuis l’amour, depuis un état amoureux, sans gluer de confiserie,
déjà, ce n’est pas donné.
L’Union sacrée entre cortex et cordial est d’or : pas irréelle, non, mais inespérée.
Certains ont ce don-là, sont riches de cet absolu pouvoir qu’il leur confère.
"Ce dieu-là existe, je l’ai rencontré", peuvent dire les heureux(ses) élu(e)s.

Mais parler de l’amour pour essayer de cerner la bestiole, c’est beaucoup plus ardu.
Malgré quelques molles tentatives, je n’ai pas encore réussi à sortir de ma boîte à outils quelque chose de potable sur le sujet. Commencer une phrase par « L’amour, c’est… » c’est … mal parti, d’abord.
C’est quoi donc, d’ailleurs ?
Un jardin de roses ? Deux papillons dans le ciel bleu ? Deux libellules sur un ruisseau ?
Un étalage de croissants au beurre ? Une paire de chaussures assorties ?
Un pot et son couvercle ? Une clef et sa serrure ? Une âme et sa sœur ?
Et la vôtre, elle va bien ?

« Le discours amoureux est tenu par tout le monde, soutenu par personne. »
dixit Barthes in Fragments d’un discours amoureux.
Oui,…et non. Tenu souvent, assez mal, en outre.
Mais pas assez, pourtant, et pas toujours par ceux dont on l’attendrait, en plus.
Ca fait pas intello de conter fleurette. C’est pas sérieux, ça déclenche les sarcasmes.
Car la perle est rare qui allie beau ramage et vrai visage.
Pas chimérique, non, mais rare. Si rare, si précieuse, qu’on l’imagine déjà broyée par les nuées de convoitises qui s’abattront sur elle comme la misère sur le monde.
Zeus dévoré par les bacchantes, une poudre de nacre inondant de sa pluie les mortelles enfiévrées.

C’est ainsi : d’un côté, les détails de l’affaire nous demeurent inconnus.
Et de l’autre, il faut bien essayer de se débrouiller avec la finitude de nos contingences et l’infinité des univers nés de nos caboches. C’est à cela que ça sert, les définitions. A faire un peu concorder les deux. A jointoyer les plaques telluriques de nos improbables tectoniques d'un peu de plâtre mal séché.
A colmater les brèches de nos planchers pour ne pas s’engouffrer dans de fatals précipices.

Alors en voici une, de définition.
Une toute petite, une toute bête, une toute banale. Une déjà vue, une déjà lue, parce qu’avec le nombre de cœurs ayant déjà battu, l’inédit dans le domaine, à part au rayon des prouesses de la chirurgie cardiaque, je ne vois pas trop. En tous cas, je ne sais pas faire.

Aimer, c’est … (oui, je vous avais prévenus, ça commence mal) vouloir le bonheur de l’autre même s’il ne passe pas par le sien.
Ca vous en bouche un coin, ça, hein ? Personne il avait encore jamais dit ça aussi bien !
L’exact contraire de la propriété affective, donc. Avoir des droits sur un coeur est un contresens.
L’amour ne se décrète, ni ne se réclame, ni ne s’impose, ni ne se revendique.
Il s’éprouve, dans le dénuement de son intime vérité.
Ou pas. Et si « pas », s’effacer.
Il se construit, pourtant, aussi, oui. Comme on construit un feu* dans le Grand Nord, malgré le froid mortel. Et il s’écrit, infiniment. Mais pas sur un texte de loi ou un registre.
Quand l’amour ne rame pas dans le même sens que le flot de la vie, quand il lutte contre le courant de la liberté, il doit rendre les armes **, car derrière la cuirasse, il n’y a déjà plus qu’un cadavre éperdu.

 

*Construire un feu, court récit de Jack London sur la marche solitaire d’un homme qui sait son salut ne tenir qu’à sa dernière allumette. Grandiose simplicité.

** Et désolée pour les références. En ce moment, les classiques sont estampillés à partir de quatre ans, à la maison.


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24 novembre 2008 1 24 /11 /novembre /2008 00:05

 

 

Evidemment, il est permis de rester perplexe. Comment être crédible, quand on passe son temps à défendre des causes, et que soudain, on se met à prôner un désengagement absolu ?
Quand on bataille pour le sauvetage de l’éducation, des ressources naturelles, de la dignité humaine, et que subitement, on se met à défendre avec la même énergie le refus de l’interventionnisme, la non-ingérence dans la vie d’autrui comme horizon indépassable ?
(L’horizon indépassable, M’sieur Kant, il l’appelle « idéal régulateur », et j’ai toujours adoré l’idée. Un absolu inaccessible que l’on sait tel, mais auquel on ne doit pas renoncer. A soi tout seul, ça définit d’ailleurs bien ce que doit être le politique : « rendre possible ce qui est nécessaire ».  Cela dit, comme styliste, on fait mieux que le « grand Chinois de Königsberg », ainsi que l’appelait Nietzsche. Parce que toute puissante que fût sa pensée, il écrivait quand même comme un pied. Alors on va le laisser se rendormir en évitant de le réveiller davantage.)

Donc, comment c’est-y qu’on va résoudre cette contradiction, hein ? Ben comme toujours, en la dépassant grâce à Miss Dialectique. Vous savez, cette idée merveilleuse qui considère tout objet comme un millefeuille, et qui fournit en plus le ressort permettant de passer d’une couche à l’autre, un peu selon le principe du saut à la perche. Et hop, quand y en a plus, y en a encore, une profondeur de plus à explorer.
(Certes, le millefeuille, c’est un peu monotone : crème, biscuit, crème, biscuit, et c’est pas la couche de sucre glace au sommet qui évite la lassitude. En plus, elle fait éternuer si on respire au mauvais moment.
Non, je préfère l’opéra, ce petit truc qui alterne beurre de cacao, crème au beurre saveur moka, une petite couche feuilletée 100% pur beurre, un peu de praliné pur sucre, etc. Que du léger, mais que du bon.
Mais on va garder le millefeuille comme métaphore, parce que dans la phrase suivante, la polysémie de l’opéra* ,ça fait tache. Et pas que sur la chemise blanche du dimanche.)
Donc, disais-je avant d’être importunément interrompue par moi-même et de ne parvenir qu’avec difficulté à sortir du pétrin de cette digression pâtissière, c’est oublier un peu vite qu’un être humain, à l’instar d’un millefeuille, a plusieurs couches. Avec, dans l’ordre d’apparition à l’ego : son caractère, son histoire, ses idées. Et j’ai toujours pensé que ses actions reflétaient davantage les deux premières composantes que la dernière, artefact somme toute assez secondaire, sauf pour ceux qui sont capables de mourir et de faire mourir pour elles autrement que de mort lente.

Bref, on peut bien à la fois avoir construit une conception du monde et de la nature humaine qui pousse à discourir sur tout et n’importe quoi, juché sur les échafaudages rutilants d’analyses biscornues, avec le même enthousiasme indescriptible qu’un enfant assemblant la plus haute tour de legos jamais vue par les murs de sa chambre (car les murs ont des yeux autant que des oreilles, on l’oublie trop souvent), et demeurer aussi pusillanime qu’un chinchilla dès qu’il s’agit d’infléchir le cours de la vie privée d’autrui de quelque façon que ce soit. Se trouver, seul devant sa page blanche ou son écran luminescent, des élans d’orateur prêt à changer la face du monde depuis la chambre des députés de la Troisième République, et demeurer, dès qu’il s’agit de s’adresser à la première épaisseur de chair humaine venue, aussi réservé et pétrifié qu’un bas-bleu dans une maison close.
Asséner au clavier de grands coups de vérités, mais ne jamais se permettre de donner des conseils à quiconque sur la façon de mener sa vie, comme tant d'autres le font dans les conversations de tous les jours. Ou bien faut vraiment qu'on vous marche sur les pieds et alors, quand même, vous suggérez au passant de bien vouloir aller poser ses péniches ailleurs, si ça ne le dérange pas trop.

Car l’interventionnisme que s’arrogent tant de bonnes âmes charitables sur l’existence du premier venu qui passe à leur portée m’a toujours sidérée.
Cela va de la débonnaire mais étouffante insistance de ces maternelles maîtresses de maison : « Mais si, allez, vous reprendrez bien encore une troisième fois de ce gros gâteau ! » alors qu’on est au bord de l’apoplexie, au verre de champagne tendu avec le sourire carnassier et l’assurance qu’il sera accepté. Avoir l’inconcevable audace de répondre d’une petite voix désolée que non, on n’aime pas le champagne risque alors de le glacer à tout jamais. « Comment ?! Vvvvous n’aimez pppas llle chhhampagne ? » s’insurge le prévenant flûtophore, aussi choqué que si l’on avait déclenché le tonnerre de Zeus en pleine messe dominicale ou si l’on avait affirmé haut et fort sa sympathie pour la si pittoresque coutume de l’excision. Alors, comme je suis bien élevée, bonjour monsieur, merci madame, je prends la flûte, j’y trempe délicatement mes lèvres en fin connaisseur, et je la repose dès que je peux, à moins de pouvoir la refiler à quelqu’un pour qui la promiscuité labiale avec ma personne via la médiation d’un fluide alcoolisé ne constitue pas un motif de dégoût rédhibitoire.
Bref, cette insistance intrusive de tant de bonnes gens qui s’arrogent le droit de décider de ce que vous allez infliger à votre estomac m’a toujours laissée perplexe. Bien sûr, tout hôte se trouve, par définition, dans l’obligation de décider à la place de ses invités de ce qu’ils vont absorber. Mais l’hôte propose, et l’autre dispose. Quel besoin de pousser plus avant l'ingérence en ingestion ? D’ailleurs, il est bien probable que là est à chercher, dans cette réticence à décider pour autrui, mon peu de goût pour la cuisine. Comment ça, c’est pas crédible et seule est en cause ma paresse ? L’un n’empêche pas l’autre, mais je vous en prie !
Sans parler des certitudes bien figées de ces bonnes mères de famille qui vous assènent que "Si, si, ma chère, je vous assure, avoir un frère ou une soeur, c'est absôôlument indispensable pour l'épanouissement d'un enfant. Un fils unique, pouah, quelle horreur ! Il sera un monstre d'égoïsme, un tombeau de mélancolie !" Ben oui, hein, z'avez qu'à regarder sa mère...
Non mais quand même, en y réfléchissant deux secondes, n’est-ce pas hallucinant, cette intrusion de ceux qui ne vous sont rien ou si peu dans ce que vous devez faire de vos entrailles ?
Sans parler non plus de cette conception mortifère qui confond aimer et posséder, embrasser et contraindre, union et annexion, conquête et bannissement.

Bref, ceux qui passent leur temps à vous dire comment vous devez agir, vous, personnellement, ce que vous devez faire de vos tripes, de votre plume, de vos vacances, ça me fait fuir, à toutes jambes. Non mais, qui êtes-vous pour me donner des conseils qui ressemblent tant à des ordres ? Avez-vous trouvé le secret du bonheur absolu ? La pierre philosophale ? Savez-vous de quelle matière intime je suis tissée ? Non ? Alors gardez votre salive et passez votre chemin, merci bien.
Le problème, c'est que je me révolte ici, toute fiérote dans le silence feutré de mon refuge, dans la trop rare solitude chérie de mon bureau, mais ces nuées de conseils aussi denses que des essaims de mouches m'empoisonnent la vie outre mesure, se mêlent à mes propres indécisions et me travaillent jusqu'à me dissoudre dans une cacophonie infernale où je n'entends plus ma propre voix. Comme ce supplice chinois de la goutte d’eau qui finit par engendrer la folie.

  Bien sûr, je ne parle pas des conseils des vrais amis que l’on sollicite. Il ne s’agit pas de faire la sourde oreille à la sagesse de ceux qu’on estime. Il s’agit que les Madame Michu à poil teint et à poussettes en fer vous lâchent les godillots.
 Faudrait pas non plus que tout le monde se sente réduit au silence par tant de véhémence, et que je me retrouve toute seule à hurler dans mon désert. C’est pas contrariant, le désert. Ca vous laisse mourir de soif dans le calme. Néanmoins, je crois que je préfère encore être dérangée de temps de temps.

Mais c’est à ce niveau-là, celui de l’interférence entre les personnes, que me semble séduisante cette conception de la vie si légère de Pessoa, cette si petite vie en marge, "je ne fais que passer, ne vous dérangez pas", cet idéal fantasmé de l’effacement, de la dissolution dans la contemplation. Cherchant sa vie durant à réduire son empreinte autant que possible, se cachant derrière des pseudonymes, gardant toujours son petit boulot d'employé de bureau invisible, ne s'engageant en rien, pour que rien ne dérange le continuum de ses méditations.

Ma vie sans moi, pour reprendre le titre de ce si beau film d’Isabel Coixet.
(Rappel) « Nous vivons tous, ici-bas, à bord d’un navire parti d’un port que nous ne connaissons pas, et voguant vers un autre port que nous ignorons ; nous devons avoir les uns envers les autres l’amabilité de passagers embarqués pour un même voyage. […] Ne pas faire de bien, parce que je ne sais ni ce qu’est le bien, ni si je fais réellement le bien lorsque je crois le faire. […] Dans le doute, je m’abstiens. Et il me semble même qu’aider ou conseiller, c’est encore, d’une certaine manière, commettre la faute d’intervenir dans la vie d’autrui. »

Et ce rêve récurrent et impossible, « ce rêve étrange et pénétrant », dirait Verlaine, m'a tentée un bon moment, me tente toujours. Pourtant, une fois qu’on a mis le doigt dans l’engrenage de la vie de famille, qu’on a fondé (fondu, en l’occurrence) une chaîne dont on est le maillon inaugural, ffrrrrout, envolée, la liberté de disparaître, de s’effacer. Les deux pieds dans la glaise et les deux mains dans la lessive.

Et puis, quoi que l'on fasse, on intervient toujours dans la vie d'autrui, comme repoussoir ou comme modèle, par le seul fait d'exister et d'être perçu de telle ou telle façon. L'universel effet papillon, ces infimes bruissements qui influencent les trajectoires des autres. Cette passante, par exemple, ignore que c'est en voyant sa grâce que je me suis décidée à me coiffer comme elle.

Et puis aussi, cette non-ingérence ne fonctionne qu’entre adultes indépendants, autonomes, égaux. Elle ne peut évidemment tenir dans un rapport déséquilibré : entre l’enfant qu’on éduque et les adultes qui le guident, dans les situations d’urgence, etc...

En cas de péril, ne pas intervenir, c’est intervenir, c’est tuer. Il est des cas ou refuser de tendre la main, c’est la couper à l’autre. La non-assistance à personne en danger, ce n’est pas être neutre, c’est se faire complice de l’accident ou du bourreau. Respecter la liberté de l’autre, ce n’est pas le regarder se noyer sans broncher en se disant que c’est peut-être lui épargner le supplice beaucoup plus long auquel il sera soumis plus tard en mettant des années à mourir d’un cancer. Ne pas intervenir, ce n’est pas rester bras croisés et bouche cousue. C’est sauver et laisser choisir en connaissance de cause. C’est dire et expliquer sans conclure. C’est éclairer sans guider. C’est donner les moyens de la liberté.

Et la liberté de choisir, en cette période d’Avent, mes bien chers frères, ne serait-ce pas de renoncer à cette désolante habitude des cadeaux de Noël qui illustrent si chèrement que l’enfer est pavé de bonnes intentions. Combien sont-ils, les cadeaux qui font autant plaisir à ceux qui reçoivent qu’à ceux qui offrent ?
Si l’amour suffisait à inspirer, quel Eden ! Mais on le sait bien, dans ce domaine aussi, l’amour est aveugle. Les seuls cadeaux qui tombent juste, sauf bien sûr les commandes directes, ce sont ceux qu’on fait aux jeunes enfants dont les vœux sont si peu inhibés, si transparents qu’il faut vraiment de la mauvaise volonté pour tomber à côté, et ceux des amoureux en pleine fusion. Les autres se heurtent comme des mésanges à une vitre trop propre à l’infranchissable incommunicabilité entre les êtres, à l’imperméable étrangeté de l’autre. Certes j'exagère, et les petits présents amicaux m'ont toujours réjoui le coeur. Mais
si l’on prenait en compte cette précaution élémentaire, ben ça éviterait d’engraisser inutilement le commerce, d’empoussiérer les étagères et d’épuiser les ressources.

 (« Chaque jour qui passe fait la terre plus lasse », hélas Yannick.)
Alors je suggère (et me v’là à nouveau en train de prêcher, prétérition, quand tu nous tiens…) qu’en ces prochaines fêtes de fin d’année, au lieu de nous ruer, toutes voiles et cartes dehors, dans les rayons trop achalandés de nos boutiques débordantes, nous offrions des arbres, ici ou

Mais non, pas un sapin sans pieds ! Plutôt le certificat qui atteste qu’on a bien financé la replantation d’un arbre dans une forêt sinistrée. C’est bien, les arbres. Ca offre obligeamment son tronc prévenant aux amoureux qui s’étreignent, ça abrite du soleil et du vent, et ça fait respirer.
Plantez des arbres !
Où l’on constate qu’ignorer l’obscure essence du bien suprême ne dispense pas d’en bricoler des bribes en espérant ne pas trop se tromper.

* Merci à Ayron pour le lien.

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25 octobre 2008 6 25 /10 /octobre /2008 10:09

 

Ayant tout de même un minimum de commisération pour les esprits égarés qui ont parfois l'étrange idée de venir se perdre en ces pages, je me permets de sortir des caractères lilliputiens des commentaires l’indigeste réponse que m’inspira ce matin l’intervention du poète aux semelles (et aux blogs) de vent.

« Vous avez devant vous un des détracteurs les plus sauvages, les plus virulents, les plus acharnés de la vision cyclique de l'univers. Je pense que ce concept est le plus néfaste du monde. Les cycles Hindous ou Grecs me rendent malades... C'est une longue histoire, une très longue histoire qui met en jeu le sort éternel des individus, selon l'attitude qu'ils choisiront d'adopter quant à ce concept. Excusez du peu... »


« Vous avez devant vous un des détracteurs les plus sauvages… » Oh my God, rien que ça !
J’en tremble. Le combat s’annonce titanesque.  :)
Mais c’est bête, je n’ai aucune, mais aucune envie de me battre avec quiconque. J’ai déjà bien assez à faire avec mes démons intérieurs : vous savez (ou peut-être pas, puisque vous n’aimez pas la lecture de ce genre de récit, ce dont vous avez bien le droit, vu les étincelles qui sortent de votre plume), un peu comme dans la Métamorphose de  Kafka, où le narrateur se réveille un matin transformé en cloporte à taille humaine. Ben moi, c’est un peu pareil, sauf que le cafard, un bien costaud, bien retors, je le côtoie chaque seconde dans la prison qu’est ma caboche. Et le tenir en respect n’est pas une mince affaire, car il se réveille à chaque frémissement de certain palpitant. Passons.
Une contrée en pleine guerre civile ne s’aventure pas à affronter de nouveaux ennemis extérieurs.
Mais sur le fond quand même, rassurez-vous. Même si j’ai employé un peu vite l’expression de « cycle fermé », emportée par l’élan de ma repartie et l’impérieux appel de Morphée qui commençait à se faire si pressant que seul un œil et un demi-neurone restaient ouverts, je ne suis pas une tenante de la conception cyclique de la marche de l’univers et de l’humanité. Pas d’un point de vue théologique et dogmatique en tous cas. Certes, l’histoire présente de troublantes réminiscences, dans la succession des civilisations qui enchaînent consciencieusement apogées et catastrophes, mais les questions de métaphysique pure, cela fait un moment que je les ai désertées. En ce domaine, seul le doute m’habite, comme dirait Desproges. Quoi que l’on croie, je ne vois pas comment les bestioles que nous sommes pourraient un jour détenir le « Pourquoi » de ce qui existe. Creuser le « Comment » des choses, là oui, les scientifiques s’y emploient brillamment, mais aussi loin qu’ils remonteront, l’ultime origine, celle du sens des choses, demeurera à jamais du domaine de la croyance, et résistera au savoir. Voilà ce que je pense, et tous les dogmes se défendent très bien tout seuls sans moi, chacun ayant levé des armées entières de croyants. Je ne vois pas en quoi il serait utile que je prenne part aux guerres de religion, fussent-elles théoriques.
Et puis, on n’a rien inventé de mieux que la roue et le cycle pour avancer, que je sache.
Un cycle n’a jamais empêché de progresser. Demandez à Bernard Hinault.
En outre, puis-je vous rappeler qu’il n’était en rien question dans le petit texte précédent de création : seulement de construction et de responsabilité.
L’homme construit, c’est un bâtisseur, et ses œuvres sont aussi grandes que ses forfaits, loué et maudit soit-il tout à la fois, amène aux fils leur pain de ce jour. Et je ne me risquerai pas à blasphémer plus explicitement face au « détracteur le plus etc… » Loin de moi l’idée de réduire l’humanité à une engeance grouillante et vaine. Non, non, ses chefs d’œuvre atteignent parfois au sublime.
Seulement, votre commentaire rappelait l’humilité de ne pas se prendre pour un créateur, dans la dimension démiurgique du terme, capable de faire du beau ex nihilo, ce à quoi j’acquiesçai  de tout l’enthousiasme saugrenu de mes enzymes à mandibules.
Point de Création, donc, mais de la construction, de la transformation, et c’est là toute la gloire de l’homme, grand transformateur devant l’Eternel de ce qui est.
Et transformer, dans ce bas monde foisonnant de formes, ce n’est pas rien. Hors des formes, que de l’atome. Le néant, en somme, le chaos. Et ce n’est pas Aristote qui me contredira, non mais.
Le cycle fermé dont Lavoisier et moi-même parlions ici, (oui, nous nous sommes croisés hier encore) c’est celui de la matière, pas de l’Histoire. Il paraît que l’univers est en expansion, mais toutes ces découvertes astronomiques dépassent largement mon humble entendement de terrienne. Sur ce caillou qu’est notre petite planète, c’est bien la finitude d’une sphère close qui règne.
Bon sens de base, c’est tout. Après, libre à chacun de construire tous les châteaux qu’il veut avec les grains de sable d’ici-bas.

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